Première publication : L’Avenir – 30 septembre (interview) et 1er octobre (critique) 2014.
‘Tu veux ou tu veux pas’ n’est pas du meilleur goût, mais pour le défendre, Sophie Marceau n’a pas froid aux yeux. Être une femme libérée, c’est pas si facile…
Sophie Marceau, vous qui êtes pudique dans la vie, vous avez accepté de jouer une nympho ?
Judith n’est pas nympho, c’est une « sex-addict », il y a une différence! La nymphomane cherche un orgasme qu’il n’arrive pas à avoir. Le « sex-addict », lui, connaît cet état orgasmique, et veut être « défoncé » à ça en permanence! C’est comme la dépendance à l’alcool ou la drogue. Judith adore avoir des orgasmes, alors elle en profite! C’est une personne joyeuse, qui s’assume.
Vous êtes une habituée des comédies romantiques. Alors, pourquoi celle-ci?
Le scénario de Tonie Marshall m’a séduite. Quand on raconte une histoire, c’est le point de vue du conteur qui fait toute la différence ! Tonie est une femme respectueuse et élégante, mais en même temps elle n’a jamais peur de traiter des sujets «borderline», elle n’est pas dans le politiquement correct. Et c’est ça que j’ai trouvé intéressant: ce mélange de sa personnalité et de ce sujet est un bon mix pour faire un film accessible, charmant, mais avec un point de vue.
Le fait que ce soit une femme, avec un sujet et un rôle pareils, ça aide à mettre en confiance ?
Certes, mais je pense que quelques-uns des plus beaux rôles féminins au cinéma ont été écrits par des hommes. Ils peuvent donc aussi avoir regard profond et pertinent sur ce qu’est être une femme. C’est vraiment plutôt une question de personne, pas de sexe. Un homme aurait pu faire un film comme ‘Tu veux ou tu veux pas’. Après tout, pourquoi pas ?
Justement, ne trouvez-vous pas que le cinéma français est un peu macho ? Quand Marion Cotillard ou Audrey Tatou tournent en Amérique, elles essuient des critiques acerbes, contrairement à Omar Sy ou Jean Dujardin…
Je pense que ça s’étend à un domaine beaucoup plus large que le cinéma: on vit dans des sociétés patriarcales depuis que l’Humanité existe, et il a été décidé que les hommes c’est dehors, et les femmes c’est dedans. Donc à partir du moment où les femmes vont dehors, elles ont beaucoup plus de mal à s’imposer. Enfin, je ne sais pas si Marion Cotillard a été plus sévèrement jugée, vous croyez? Je ne m’en rends pas compte…
Quand même, la presse et le public l’ont lynchée pour ‘Batman’… Était-ce pareil pour vous, quand vous avez tourné ‘Braveheart’ par exemple ?
Moi je fais la politique de l’autruche: quand ça ne plaît pas j’ouvre des grands yeux et je dis « Ah bon ? Je croyais que ça vous plaisait! » (Rires) Mais je pense que la culture française est quand même plus féminine que la culture américaine. C’est pas gagné hein, je ne vous dis pas qu’on est à égalité, je ne vous parle même pas des salaires acteurs-actrices… En gros, quand vous êtes actrice, vous avez tout de suite 30% de moins, je ne sais toujours pas pourquoi ! Mais de la même manière, une conductrice gagne moins qu’un conducteur. On le sait, on y travaille… Mais regardez notre cinéma, il y a énormément de femmes réalisatrices, alors qu’il y en a peu dans le cinéma américain. Regardez Coline Serreau, Nina Companeez, Nicole Garcia, Tonie Marshall bien sûr… et j’en oublie !
TU VEUX OU TU VEUX PAS ?
De Tonie Marshall. Avec Sophie Marceau, Patrick Bruel…Durée : 1h27. Sortie Belgique : 1er octobre 2014
Que se passe-t- il quand un ex-pilote sexomane devenu thérapeute conjugal abstinent rencontre une jouisseuse invétérée très portée sur la chose ? Réponse : une comédie mugissante où les couleurs pétillent, les acteurs cabotinent, et quelques blagues bien senties arrachent des sourire surpris. Si Marceau est à l’aise et que Bruel fait ce qu’il peut, Tonie Marshall (‘Vénus Beauté’) nous avait habitués à mieux. Bonus quand même pour l’apparition sympathique de Jean-Pierre Marielle.
crédit photos : Alternative Films